Il y a tant de sous-genres aujourd'hui qu'il est complexe de catégoriser les nouveaux groupes. Ces derniers s'alimentent à tellement d'auges différentes que, consciemment ou non, leur noyau créatif – ici un Black moderne bien burné – sera teinté d'autres styles – ici le Death lourd. Cette fusion rappellera bien sûr ce que nous sert le gourou Nergal et BEHEMOTH depuis des années, et ça tombe pile-poil, car OUTRE est polonais. Et ça s'entend.

Vous retrouverez dans ce four crématoire un peu de DEATHSPELL OMEGA, de SVART CROWN, de ORDER OF APOLLYON et consorts. C'est bien barré, charbonné, huileux, bref, les couleurs de la pochette ont été choisies avec soin. "Ghost Chants" n'est pas nécessairement un titre très évocateur de ce Black poisseux et incisif par contre, mais bon, menu détail qui nous passera par-dessus la tête lors de la dégustation. Un festin éclair qui s'enfile en 36 minutes, alors soyez attentif, ces jeunes metalheads n'avaient pas l'intention de se transformer en scientifiques pour ce premier tour de piste, qu'en brutes épaisses qui ont le sens de la compo et le désir de maturer rapido.

C'est donc avec cette image que je vous conseille de vous farcir le combo, qui à n'en pas douter, saura nous ravir davantage dans un futur rapproché. "Ghost Chants" est une suite de claques pas trop subtiles, dont les plus bourrines sont gavées de riffs nerveux, de sections rythmiques obèses et d'assauts atomiques. Ça frappe dur chez OUTRE, dur de passer outre, ça hurle, ça ne décolère que peu souvent, à part sur les première et dernière plages et sur "Equilibrium", sorte d'en-cas pour le duo mortel final dont vous ne ressortirez qu'amoché. Idem pour les uppercuts "The Fall" et "Lament", qui suivent un "Shadow" assez accrocheur. L'album se trouve ainsi bien tempéré, malgré son petit compteur, et arrive à garder l'intérêt de l'auditeur, qui passera d'émerveillements à une certaine fascination pour ce mélange singulier.

J'ai pris énormément de temps à absorber "Ghost Chants", énième œuvre à s'attaquer à la religion et à ses guerrières déclinaisons, pourtant si court et direct. Je ne sais trop pourquoi, mais j'en suis heureux aujourd'hui, car sa substance m'habitera longtemps malgré sa simplicité dans le genre. Sans doute est-ce la violence décuplée par le quintette polonais, la force avec laquelle ils déboîtent nos cervicales et nous clouent à notre siège (ou nous font moshpiter, c'est selon) avec ce premier album. "Ghosts Chants" s'avère au final une œuvre caméléon si on arrive à la percer à jour ; elle peut incarner la fin du monde ou une trame sonore d'un western d'horreur avec ce petit côté macho dans les guitares sonnant suédois ! Considérez-le comme bon vous chante, il saura se coller à votre volonté pour votre cortex faire exploser.

OUTRE est un putain de carnassier, je vous le dis, il n'a pas fini de nous griffer et de nous mordre. Il serait bête de ne pas enchaîner sur une telle débâcle. Ce serait comme lever le nez sur une petite fortune d'or noir, qui a le potentiel de jaillir violemment d'une terre aride et boueuse. Les Polonais possèdent tous les outils pour l'exploiter et muter, qui sait, vers une des nouvelles figures de proue du Black-Death.

Through the vault of nothingness
No light have dug its way
Into the land of darkness
No fields have given yield

Podium : (or) "The Fall", (argent) "Vengeance", (bronze) "Lament".