Dès les premiers riffs de "Twilight Points The Way", nous sommes emportés dans un maelström. Toute la force de l'écriture de SUMERLANDS opère immédiatement, on est embarqué sur cette voie céleste, porté par cette musique planante et envoutante. Cette sensation n'est pas nouvelle, on commence à la connaitre depuis le premier album de SUMERLANDS et ceux de ses groupes frères. Arthur Rizk n'est-il pas depuis quelques temps un nouveau "Monsieur Heavy Metal" ? Une nouvelle référence, à la fois producteur et musicien, qui transforme en or tout ce qu'il touche, non ? En tout cas, ce "Dreamkiller" aura de quoi convaincre les indécis.

Ce second album, s'il s'inscrit dans la continuité du premier, apporte son lot de changements qui évitent au groupe de refaire deux fois la même chose. Déjà le line-up a évolué : avec la venue à la basse de Brad Raub c'est désormais tout le line-up d'ETERNAL CHAMPION que nous retrouvons ici, hormis son emblématique chanteur, Jason Tarpey. Et justement, il y a eu aussi du changement au poste de frontman : Phil Swanson laisse son trône à Brendan Radigan. Pour ceux qui ne le connaissent pas, Radigan est une figure de la scène Hardcore de Boston (oui, Hardcore...), il est connu notamment pour jouer dans de nombreux groupes à la fois et a donc à son actif un bon paquet d'albums. L'homme est particulièrement éclectique, puisque outre le Hardcore, il s'adonne aussi aux joie du Black Metal, du Punk, du Heavy/Doom, du Sludge et donc aussi du Heavy traditionnel. Un point commun qu'il partage aussi avec Tarpey qui venait également du Hardcore. Il est cependant très intéressant de constater que ces musiciens éclectiques commencèrent généralement d'abord leur carrière avec des choses extrêmes avant d'élargir leurs horizons vers des styles plus Heavy, plus précis et exigeants, mais aussi plus apaisés. Y a pas à dire, le Heavy de tradition c'est la voie de la sagesse.

Il n'en demeure pas moins que le départ de Swanson pouvait inquiéter. Verdict : pari gagnant pour SUMERLANDS. Le souci avec Swanson c'est que sa voix était souvent trop proche du style de Jason Tarpey (et pour cause : Swanson est le mentor artistique de Tarpey !), de ce fait SUMERLANDS tendait sérieusement sur son premier album à sonner comme une version "doomifiée" et plus atmosphérique d'ETERNAL CHAMPION, ce constat est moins valable sur ce second opus et c'est tant mieux. Certes, on se rends vite compte que ce sont les mêmes musiciens derrière, il y a toujours des similitudes, et notamment au niveau de la prod'. Mais si la pochette gomme toute référence à l'Héroic Fantasy ce n'est pas pour rien. Ainsi l'approche musicale se veut désormais plus variée, les tempos sont très différents d'un titre à l'autre, et l'on notera une accélération globale du propos sans pour autant trahir les influences Doom qui restent présentes. Radigan fait un boulot d’interprète remarquable, posant ses lignes de chant clairs et aériennes avec talent, dans un halo de reverb bien dosée. SUMERLANDS procure cette sensation quasi unique d'un Heavy aérien et spatial, mais toujours captivant, jamais ennuyant ou trop éthéré.

Revendiquant totalement un aspect vintage, le clip "vhs" du title track étant sans ambiguïté, l'album se décline sous un format à l'ancienne : 8 titres pour 35 minutes, une tendance qui devient récurrente dans le Heavy traditionnel. Un format qui évite les titres faibles en trop grand nombre, même si tout n'est pas au même niveau. On retiendra en premier lieu "Dreamkiller", qui donne donc logiquement son titre à l'album, et qui n'est pas sans contenir un gros clin d’œil à JUDAS PRIEST avec son pont central qui évoque celui d'"Exciter". La brève intro de synthé de "Force Of The Storm" nous fera également penser à "Turbo Lover", en bien plus succinct, le morceau partant ensuite dans une direction différente et toujours céleste : quand Iron Eagle rencontre Top Gun.

Si les cavalcades Heavy sont de mises, SUMERLANDS sait aussi toujours proposer des morceaux aux tempos plus posés ("The Savior's Lie") ou proche d'une véritable ballade ("Night Ride", dont le refrain peut faire penser à du vieux QUEENSRŸCHE, le seul qui vaille), voire se rapprochant carrément du Hard Rock mélodique ("Heavens Above"). Le travail des synthés se veut très souvent atmosphérique, je ne serais pas étonné que Rizk ait écouté "Oxygène" de notre Jean-Michel JARRE national ("Edge Of A Knife"), ce travail d'ambiance confère tout son sel à cet album, des claviers qui savent toujours s'effacer quand il faut pour laisser la place à des guitares puissantes et massives. C'est que la Charvel et la Strat' Dave Murray sont de sorties, soit le meilleur des mondes guitaristiques.

SUMERLANDS a certes pris son temps pour revenir dans le chaudron du Metal, mais l'attente en valait la peine, ce second album surpassant le premier essai. A notre époque où une identité forte est devenu plus que jamais un des principaux critères de qualité lorsque l'on officie dans un style bien balisé, SUMERLANDS s'en sort haut la main, bien au dessus de la masse des groupes porteurs du sigle NWOTBHM ou assimilés.