Il est presque fâcheux que par un hasard criminel ce disque se trouve ainsi propulsé représentant de la scène Black Metal norvégienne et de ses sempiternelles frasques, devenant ainsi pour certains, et à mon grand étonnement, un avatar de la violence, de la haine, du mal ou de la folie. Il est également fâcheux que son géniteur soit, ici agité comme une marionnette meurtrière, sataniste et nazie, là brandi comme un gourou mémétique du retour à la terre de fachos en manque de repères, tant ces personnages n'ont absolument rien à voir avec la musique dont je veux vous parler aujourd'hui. Le problème n'est pas bien sûr que ces péripéties homériques aient une quelconque influence sur la qualité de la musique mais plutôt que sa découverte en soit gâchée. Il faudrait idéalement, pour découvrir le meilleur album de BURZUM, ignorer tout de lui. Ne lisez pas plus loin.

Tormented by God's goodness
No hate no flame
They were right we have come to hell

"Hvis Lyset Tar Oss" : le meilleur album de BURZUM et l'un des meilleurs albums de Black Metal de l'histoire. Un voyage mystique inachevé depuis BATHORY et HELLHAMMER vers VANGELIS et KRAFTWERK. Un équilibre contemplatif entre narration et répétition, entre les grésillements organiques dégueulasses de la guitare et la pureté artificielle des synthétiseurs. La voix transmutée, inhumaine dans une violence qui après tant d'années glisse sur moi comme liquéfiée, sublimée pour se dissoudre dans l'air ambiant. "Hvis Lyset Tar Oss" le frère de "Transilvanian Hunger", le Rock qui cherche à noyer son désespoir de n'être pas de l'Ambiant sous des hurlements et des couches de bruit : des aboiements de chien qui ne mord pas, des aspérités qui se poncent et se liment à l'usage, jusqu'à dévoiler un noyau pur, parfaitement lisse et sphérique.

"Hvis Lyset Tar Oss" et l'héroïque croisade contre la charlatanerie Vikernes-ienne : une occasion de se rappeler de ce célèbre poncif qu'est la bonne vieille arnaque du Rock'N'Roll, pesante ancre de la pensée à ranger à côté de ce sacré "art mineur". Depuis BACH jusqu'à COLTRANE et depuis GAINSBARRE jusqu'à BURZUM il y aura toujours moyen de voir la musique comme une arnaque car elle n'est somme toute que l'ondulation éphémère d'atomes sans action durable sur leur organisation. Car la musique c'est la duperie, le mensonge, la représentation de l'inexistant, l'exploitation des biais cognitifs humains. Vouloir comprendre la musique c'est vouloir comprendre comment s'être fait entuber pendant des années. Le musicien : une pine, l'auditeur : un con. Comment ne pas partager le sentiment de ceux qui en apprenant les théories qui décrivent son fonctionnement se sentent trahis devant ces V-I ridicules, ces empilements de tierces, ces progressions médiocres recopiées depuis des siècles, cet artisanat mécanique de la sacro-sainte mélodie et son prophète l'inspiration qui annonce sa venue. Et vous pauvres metalleux ontologiquement inférieurs, me parlez pas du riff, j'en pouffe. Que tombe le rideau qui cache l'orchestre : il n'y a rien. Pas de paysages idylliques, pas de batailles sanglantes, pas de déités omnibénévolentes, pas de géhenne infernale. Et même pas la charité d'une inspiration surnaturelle ou d'une divinité descendue sur terre pour accorder le don d’illusionniste en même temps que la synesthésie, l'oreille absolue et le bon goût. Rien que des hommes petits, mortels et laids qui actionnent des leviers et agitent des fréquences. BURZUM, comme le Rock et par ailleurs toute la musique, est bel est bien une arnaque. Réveillez-vous, idiots, la musique n'a plus de valeur ! Les rêves n'ont jamais existé que dans vos têtes !





Bon après entre nous même si j'aime un peu "Tomhet" y a parfois des jours sans.