Au royaume du Black Metal Mélodique, les Finlandais sont des rois. MOONLIGHT SORCERY, cela vous dit forcément quelque chose ? BLOODY VALKYRIA, à bien y regarder de plus près, cultive son Black sur les mêmes terres avec notamment une imagerie et des thèmes similaires mêlant chevalerie, esprit guerrier et epic-fantasy, mais beaucoup moins du côté Power Metal de la force. Signé chez Northern Silence Productions, excusez du peu, Jere Kervinen, seul maître à bord, nous livre un second album de prime abord assez insaisissable tant sa richesse et sa complexité nécessitent un nombre d’écoutes important. Cette fois-ci, le sieur a musclé un peu plus le jeu par rapport à "Kingdom In Fire", le premier album. Plus épique et un tantinet moins Heavy dans les mélodies, Jere Kervinen nous montre à voir tout de même son amour immodéré pour le riffing et les leads transperçants.

Bien arc-bouté sur ses guitares, l’on devine aisément Jere Kervinen peaufiner ses lignes de guitare des heures durant à l’écoute de ce "In Our Home Across The Fog". Si l’album compte des longueurs évidentes, il a le mérite de nous adresser des fulgurances assez exceptionnelles et des chevauchées mélodiques à nous donner le tournis en nous laissant les yeux écarquillés, pointés en leurs directions. Prenez le superbe titre de plus de douze minutes qu’est "May Chaos Take The World" et ressentez ce haut degré de technicité, ces breaks sensibles tout en délicatesse où un violon ou des leads précieux, d’une émotion à fleur de peau, viennent s’échouer dans le creux de nos cœurs. Cette composition – sans doute l’acmé de l’album, comme j’aime à le mentionner – se caractérise par ses structures épiques, ses orchestrations richement mélodiques et une ambiance immersive dont les influences principales se veulent proches des œuvres de Tolkien ou de l’esthétique sombre de jeux tels que "Elden Ring". Tout à la fois lumineuse et densément mélancolique, ce titre vaut quasiment à lui seul l’écoute de cet album. Je ne m’en lasse pas.

Je pourrais disserter longtemps sur ce titre et prolonger mon sentiment plus que nécessaire, mais il faut aussi penser aux autres compositions de "In Our Home Across The Fog", car aucune d’entre elles ne chôme vraiment ou ne se languit dans un sur-place monotone et ennuyeux. J’apprécie notamment tous les titres instrumentaux (au nombre de trois sur cet album), qui nous montrent, pour deux d’entre eux, les talents de conteur-claviériste de Jere ("Radahn Festival" et "The Loyal Half-Wolf"). L’autre, "From Stormveil To Liurnia" (même s’il est traversé par quelques vocaux), quant à lui, s’attelle à nous époustoufler de la vive intensité et du talent guitaristique hors pair de Jere Kervinen et de sa fusion avec des éléments symphoniques qu’il arrive à capter assez prodigieusement. "Tale Of House Hoslow" est aussi un de ces titres que j’affectionne particulièrement sur cet opus. Son introduction délicatement mélodique, entre majestuosité des riffs, touches de piano, cordes de violon frottées et nappes de claviers, nous amène vers des leads de toute beauté, qui n’augurent pas encore tout à fait des éclats géniaux de la suite du titre… Écoutez-moi donc cette merveille ! Cela me laisse pantois et rêveur à la fois.

Pantois, car le géniteur de BLOODY VALKYRIA est jeune et déjà un multi-instrumentiste accompli, de talent, qui nous a conçu un nouvel album sacrément riche en un peu moins d’un an. D’une certaine manière et dans un autre style, le talent de Jere Kervinen m’a rappelé celui aussi de Jack Bollenbacher au sein de son projet MYSTECHRON (dont je ne peux que vous conseiller l’écoute de son superbe "Cosmic Entropic Iconoclasm", chroniqué en ces lieux) ou bien encore à Nimbklorg, le capitaine à bord du vaisseau SHYLMAGOGHNAR. Ces jeunes pousses ont dans leurs mains et dans les cordes le talent des lendemains du Metal extrême. En quittant cette chronique, je me surprends à m’écouter en boucle le si beau titre "Age Of Stars" qui conclut cet album… Et pour cause. Avec son agressivité relative et la ballade sonore qu’il nous transmet en un peu plus de huit minutes, voilà que, délicatement, je baissais moi-même les armes pour me livrer à Morphée dans une rêverie riche et passionnante.