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- Membre : Rainbow, Dokken, Albert Bouchard, Joe Lynn Turner
- Style + Membre : Blue Coupe

BLUE ÖYSTER CULT - Imaginos (1988)
Par DARK BEAGLE le 23 Décembre 2020          Consultée 6279 fois

Certains albums ont une véritable histoire. Ils ne répondent pas simplement au schéma groupe qui finit sa tournée -- groupe qui entre en studio -- groupe qui repart en tournée. "Imaginos" est un de ceux-là. Il ne répond pas aux tracas habituels d’une formation, il développe sa propre mythologie et devient aussi abscons que son concept et demeure encore aujourd’hui une espèce de mystère. Chef d’œuvre improbable pour certains, daube innommable pour d’autres, cet opus ne laisse pas indifférent. Bon, je bourre ma pipe et je fais une caresse au chat (et non pas l’inverse) et je vous en cause un peu.

Bon, prenons la situation de BLUE ÖYSTER CULT en 1986. Le groupe venait de publier "Club Ninja", qui a fait un flop commercial total. Aussi Bloom et Roeser préfèrent partir en tournée et ne pas s’arrêter, l’opération devenant plus rentable que de payer un studio pour des ventes médiocres. La maison de disques ne fait pas non plus des pieds et des mains pour que son poulain, autrefois flamboyant, fasse une énième course où il terminerait mal classé. Cela va être le début de longues périodes sans nouveautés à se mettre sous la dent pour les fans, ceux qui n’ont pas hurlé à la trahison après "The Revölution By Night" et "Club Ninja".

En parallèle à cela, nous avons Albert Bouchard, qui a claqué la porte du groupe peu de temps après la sortie de "Fire Of Unknown Origin", qui travaille sur des poèmes de Sandy Pearlman, le sixième membre du groupe et va mener un projet très ambitieux, qui reprendrait toute la mythologie derrière le BÖC autour de textes intéressants, jouant sur la théorie du complot avec un aspect fantastique très développé. Après, quand il propose son projet à la maison de disques, il se heurte à un mur : ce concept ne correspond pas à ce que les gens attendent, cet entertainment que dégageait le Hard Rock dans les années 80 avec cette brise de légèreté.

Pourtant, des démos ont été enregistrées pendant des années, à mesure que les compositions s’étoffaient, que les minutes devenaient des heures. Dans son format original, "Imaginos" aurait certainement été un double album, peut-être un brin boulimique. Mais le projet a été mis au placard et c’est là que Sandy Pearlman a eu l’idée de le faire passer sous la coupe de BLUE ÖYSTER CULT. Je vous laisse imaginer la tronche à Bouchard quand on lui annonce ça. Mais puisque la maison de disques lui a fait comprendre que son nom seul ne suffit pas, que sans le BÖC, il n’est qu’un inconnu, il convient que c’est certainement la meilleure solution.

Pour le coup, nous retrouvons le line-up original de la formation. Allen Lanier est revenu pour l’occasion. Pourtant, à part Roeser et dans une moindre mesure Bloom, personne ne fourrera son nez dans les compositions, cela reste avant tout le disque d’Albert Bouchard, son grand-œuvre à lui. Aussi, "Imaginos" est un disque complètement à part dans la carrière du BÖC, tout en étant étrangement familier. Quand on l’écoute, le groupe est immédiatement identifiable, il reprend quelques éléments de "FOUO", avec des relents plus mid ’80 qui lui donne une tessiture particulière, due à une production qui met l’accent sur la réverb’, datant immédiatement l’album.

Derrière sa pochette classieuse, qui fait songer à un film d’épouvante des années trente, se dissimule un album particulier, hors du temps. Il ne se vit pas franchement comme un disque classique. Il contient son lot d’invités, qui prennent beaucoup de place, particulièrement au niveau des guitares : Roeser ne signe finalement que peu de soli sur ce disque, il s’efface volontiers pour laisser parler ses camarades, et pas des moindres puisque Joe Satriani fait une intervention très remarquée sur "The Siege And Investiture Of Baron Von Frankenstein’s Castle At Weisseria" (ouais alors je vous préviens, j’abrège le titre quand j’en causerai à nouveau !). D’autres viennent squatter le micro, comme Joey Cerisano (SILVER CONDER), ou encore Jon Rogers (qui lui ne sera pas très productif par la suite). Aussi, il est possible de concevoir "Imaginos" non pas comme un opera Rock, mais comme une « comédie musicale ».

Arrêtez de vous insurger et de façonner vos poupées vaudou à mon effigie (surtout ça d’ailleurs, vous pouvez pester en revanche, du moment que vous le faites en silence), mais le côté choral de l’album, avec ses nombreux chœurs et ses différents chanteurs, ainsi que des refrains facilement assimilables peut conduire à cette impression. Ajoutez à cela un côté larger than life pour du BLUE ÖYSTER CULT et vous obtenez un ovni, le genre de truc inclassable, qui prend de nombreuses directions, qui choisit parfois des voies de traverse et qui indéniablement est terriblement intense. Un peu comme si MEAT LOAF s’était acoquiné avec BLACK SABBATH pour un temps. Et aussi, "Imaginos" tient lieu d’expérience mystique.

Nous suivons en effet la quête de "Imaginos", un mutant (un peu comme un X-Man si vous voulez), en charge de retrouver un miroir doté de sombres pouvoirs. Ses employeurs ? Les Invisibles. Une espèce de confrérie dont les buts ne sont pas des plus louables. C’est ésotérique et complexe à souhait, Pearlman a laissé un sacré terreau à Albert Bouchard. Ce dernier a passé du temps à démêler les idées, les agencer, les mettre en place pour raconter cette histoire, avec des passages plus posés et d’autres qui en deviennent quasiment épiques. En fait, "Imaginos" contient son lot de moments grandioses, ponctués par de petites faiblesses.

Et décrire ce disque est finalement un exercice assez périlleux, un peu vain également. Il ne ressemble à rien d’autre, sinon à du BLUE ÖYSTER CULT, ce qui est déjà pas mal, si ce n’est l’essentiel. Ici, tout est ambitieux. On sent que Bouchard a longuement réfléchi à son truc et qu’il n’a rien laissé au hasard. Si "The Siege...", de par sa position centrale, fait office de pivot, l’histoire devient plus mordante et certains morceaux se veulent plus mémorables, dont cette étrange version de "Astronomy", le titre-phare de "Secret Treaties" (1974), qui prend de nouvelles couleurs, plus Hard, avec sa basse bien en avant. Chacun se fera son opinion dessus, même si je vous avoue que ma préférence va toujours vers l’originale même si cette relecture n’est pas désagréable.

"I Am The One You Warned Me Of" est idéalement placé en ouverture, avec l’un des refrains les plus puissants de cet opus, avec celui de "The Siege…", superbement contrebalancé par une utilisation des chœurs très intéressante. Les refrains sont d’ailleurs parfois un peu pauvres. Vous voyez les trucs à la "Heaven Can Wait" ou les "No More Lies" de IRON MAIDEN ? Le même genre, mais avec des lignes mélodiques plus travaillées. "Del Rio’s Song" ou "In The Presence Of Another World" ne brillent pas à ce niveau par exemple, mais ils disposent d’autres qualités pour compenser. Outre des chœurs travaillés, le groupe fait également évoluer ses morceaux, passant d’une certaine douceur pour passer à quelque chose de plus raide. Bloom et Roeser assurent toujours bien, leurs suppléants sur la chanson-titre ou "The Siege…" font très bien leur job.

Et on va revenir sur l’intemporalité de cet album. La seule chose qui permet de dater ce disque au carbone 14 avec certitude est cette réverb’ qui vieillit un peu mal. Vous changez la production de cet opus et vous pourriez le placer dans les ’60, les ’70 ou même les ’90 sans trop de problèmes. Comme cela a déjà été dit, ou suggéré, la musique de BLUE ÖYSTER CULT ne collait pas à cette année 1988. Le groupe ne parlait pas de cul, d’aller faire la fête ou de se défoncer avec tout ce qui passe sous la main, de l’acétone à l’héroïne. Les musiciens dégageaient cette image d’intellos, peut-être un peu prétentieux et hautains, et pas assez de scandales pour que les journaux parlent d’eux et que MTV diffuse leurs clips en heavy rotation. Une énigme en quelque sorte et en ces années où la plupart des maisons de disques ne savaient plus travailler leurs poulains, la suite n’en devenait que plus prévisible…

L’album a fait un flop. Un vrai, un beau. Encore un. Un truc qui n’aurait même pas dû être envisageable mais qui pourtant a eu lieu. À l’époque de la superficialité, ce truc était en marge. Il ne pouvait pas réussir. Puis les années passent et petit à petit, ce disque est réhabilité un peu partout, il est cité comme une des œuvres essentielles du BÖC et pour cause ! il semble raconter ce qu’est BLUE ÖYSTER CULT, donner les clés pour comprendre ce qu’est ce groupe. D’ailleurs, la formation ne survivra pas longtemps sous cette forme et le trio Bloom/Roeser/Lanier va continuer son petit bonhomme de chemin après s’être faits virer du label, à tourner intensément. Ils apparaîtront sur une BO obscure avant de faire leur comeback dix ans plus tard… Mais là, c’est une autre histoire.

PS : je pensais mettre un 3 à la base, mais les écoutes répétées m'ont convaincu de passer au rang supérieur. Il demeure l'album du BÖC le plus abouti des '80 après "Fire Of Unknown Origin".

PPS : oh, et trente-deux ans après les faits, il semble que la pilule n’est toujours pas passée pour Albert Bouchard qui vient de sortir un album sous son nom propre, "Re Imaginos". Mais ça aussi, je vous en parlerai un autre jour…

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   (2 chroniques)



- Eric Bloom (chant)
- Albert Bouchard (guitare, chant, percussions)
- Allen Lanier (claviers)
- Joe Bouchard (claviers, chant)
- Donald Roeser (guitare, chant)
- Thommy Price (batterie)
- Kenny Aaronson (basse)
- Jack Secret (chant)
- Tommy Moringiello (guitare)
- Jack Rigg (guitare)
- Tommy Zvoncheck (claviers)
- Shocking U (chœurs)
- Joey Cerisano (chant)
- Jon Rogers (chant)


1. I Am The One You Warned Me Of
2. Les Invisibles
3. In The Presence Of Another World
4. Del Rio's Song
5. Frankenstein's Castle At Weisseria
6. Astronomy
7. Magna Of Illusion
8. Blue Öyster Cult
9. Imaginos



             



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