"Shades Of God" est un album charnière dans la carrière de PARADISE LOST et il arrive que les charnières soient grippées et qu’elles grincent de sinistre façon. Pour les gai-lurons d’Halifax, Angleterre (terre de gens rigolos si l’on se réfère à Terry Pratchett, les Monty Python et dans une certaine mesure Neil Gaiman), c’est le début de la reconnaissance, le groupe fait parler de lui et surtout, il est à présent signé sur un label qui en veut ; Music For Nations.

Cela va se traduire par une production plus fluide, plus légère et forcément, cela va changer la donne. "Shades Of God" marque une évolution logique, l’album est plus posé, plus musical également. Le travail sur les mélodies est plus poussé et l’influence METALLICA se fait ressentir dès "Mortals Watch The Day", le premier morceau. Pas de quoi crier à l’hérésie non plus, en 1992 METALLICA était bien plus respecté (et respectable ?) qu’aujourd’hui et un certain "Black Album", avec ses défauts comme ses qualités, avaient fait bouger bien des choses.

Même Nick Holmes s’est assagi. La voix n’est plus aussi Death que par le passé, elle s’affine de plus en plus, elle devient même abordable pour l’auditeur lambda (qui fera quand même une grimace face à cette amas de gravier qui lui arrive dans les oreilles). En théorie, PARADISE LOST est plus beau, plus fort. Mais après de nombreuses écoutes de ce disque, il apparaît que la formation est assez hésitante dans le fond. Les morceaux sont longs, ils finissent par être lassant pour la plus part et l’ennui fini par guetter l’auditeur.

Et si on se réveille sur le speedé (toutes proportions gardées, ce n’est pas du SLAYER non plus) "Pity The Sadness", c’est surtout "As I Die" qui est la révélation. Oui, une révélation. Parce que sur ce titre, PARADISE LOST a tout donné, il est parfait. Le groupe nous dicte son sens de la mélodie qui fait mouche, du refrain que l’on va retenir et hurler avec le groupe sur scène (même si, étrangement, PARADISE LOST semble depuis quelques années le jouer avec une belle pointe de m’enfoutisme…). Y a rien a jeter sur ce morceau, qui remet malheureusement tout le reste en question. Car le chemin pour arriver à cette splendeur est long et laborieux…

"Shades Of God" aurait finalement gagné à n’être qu’un EP, histoire de faire patienter avec la déflagration que sera "Icon" l’année suivante. L’album a ses moments, il a aussi ses passages qui sonnent vides, qui ne se retiennent pas plus que cela. Il brille par touches diffuses, un peu partout, chaque morceau à son petit passage qui flatte l'oreille. Un léger faux pas, sans trop de conséquences.