Ah ! "Show No Mercy" ! Si un jeune l’écoute aujourd’hui pour la première fois, il va certainement trouver ça daté, brouillon et ben pas très original. Bon, mais les jeunes en 1983, ils se sont pris une grosse baffe derrière la tête, un coup de maillet dans les joyeuses et une morsure de pitbull dans la cuisse en écoutant ce disque. À peine remis du "Kill’Em All", ils se sont tapés ce truc et il y a de quoi y laisser ses dents sur le parquet.

Bon, la pochette est moche. On croirait un homme bouc de la saga "Diablo". Ok, la prod est assez pourrie, mais ce côté brouillon (terme qui restera en commun entre 1983 et 2021) lui confère un certain charme. Le groupe joue pied au plancher et ça défouraille sec. Guidé par un guitariste patibulaire (Jeff Hanneman), secondé par un gratteux encore plus moche (Kerry King), SLAYER déboule à cent à l’heure, sans faire de quartier. La batterie est un magma sonore, Lombardo n’a pas la finesse de jeu (je me comprends) qui le caractérisera par la suite, la voix d’Araya part grave en couille dès qu’il file dans les aigus.

Et pourtant cette sauvagerie est plaisante. Vous voyez le côté jusqu’au-boutiste que pouvait représenter VENOM à l’époque ? EN 1983, SLAYER s’en bouffait 12 des comme ça au petit déjeuner. Si le look est similaire, niveau brutalité, il y a un précipice d’écart. Et au travers cette fougue juvénile se détachent certains des morceaux destinés à devenir des classiques du genre. Ces "Antichrist", "Die By The Sword" ou encore le terrible "Black Magic", des morceaux encore très marqués par le Heavy Metal, dopés par une vitesse hallucinante.

Cela reste bien entendu très perfectible. Il n’y a pas cette espèce d’implacabilité froide qui caractérise METALLICA sur "Kill’Em All". À dire vrai, il n’y a pas franchement des masses d’indices comme quoi SLAYER serait capable de relever son niveau de jeu pour voir plus loin. "Show No Mercy", c’est un disque jubilatoire qui déborde de rage adolescente, un pamphlet aux bonnes valeurs et un satanisme d’opérette, mais qui devait faire peur dans les chaumières au moment du déballage des cadeaux de Noël en 1983.