Qu’on se le dise, on mesure encore mal depuis nos vertes contrées l’impact de ce disque sur nos musiciens favoris. Même parmi les plus experts d'entre-nous, comme l’ami John Duff (paf, la balle pas totalement perdue !). Sans les DEAD KENNEDYS (quel nom de groupe, mes aïeux !), pas de GREEN DAY, pas de FAITH NO MORE, pas de SYSTEM OF A DOWN. Ouais, rien que ça, et j’en passe et des meilleurs. Brûlot Punk-Rock intemporel, "Fresh Fruit For Rotting Vegetables" fait partie de ces pierres angulaires un brin oubliées de ce côté de l’Atlantique.

Nous sommes en 1980, et Jello Biafra vient de tenter de se présenter à la mairie de San Francisco. Barré par une nouvelle loi spécialement promulguée, le Coluche ricain se concentre ainsi sur la musique, et tant mieux pour nous tant le gaillard brille de mille feux sur la galette, dans un style entre Punk et Rockab/Psychab’, totalement habité. Je ne réalise seulement de nos jours à quel point Serj Tankian (SOAD) lui a tout piqué, mais Patton (FNM) s’est également bien servi, le cochon.

Fidèle à un style qu’il a contribué à façonner, l’album va à 10 000 à l’heure, imprégné par un sens de l’urgence qui n’a d’égal que celui de l’absurde et enquille les tubes de 2’30, ("Kill The Poor", "California Über Alles", "Chemical Warfare", "Holiday In Cambodia") comme autant de perles sur un collier arraché à l'intelligentsia démocrate de Rosalynn Carter. Irrévérencieux, politiques, sales et provocateurs, les DEAD KENNEDYS n’auront pas oublié en chemin de produire de la bonne musique, portés par la basse gigantesque, et je pèse mes mots, de Klaus Flouride, autre grand monsieur du combo avec le trop mésestimé East Bay Ray (guitare).

Si la production un brin craspec sied aux canons en vigueur du genre, elle a l’élégance (si je puis dire) de bien traverser le temps, au contraire des tentatives pompeuses de l’époque. 33 minutes de pure énergie dévastatrice d’un bout à l’autre qui n’ont pas pris une ride pour ce qui reste peut-être mon disque Punk favori.