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BEHEMOTH - Evangelion (2009)
Par MEFISTO le 10 Août 2009          Consultée 16535 fois

"Evangelion" veut dire « bonnes nouvelles », en grec, et est souvent cité dans les histoires bibliques (Dieu sauveur de l'humanité et son fils Jésus-Christ, mort sur la Croix et ressuscité, bla bla... bla). Depuis qu’il a forgé sa place dans la cour des grands du Death à tendance Black, chaque sortie de BEHEMOTH est une bonne nouvelle. Comme la neige qui fond au printemps ou la fin d’une rémission : une sacrée bonne nouvelle.

Un nouvel album de BEHEMOTH rend aussi accroc, on y revient constamment dès qu’on y a jeté une seule fois son dévolu. Il a une force d’attraction extrêmement puissante, l’effet qu’il a sur notre quotidien est dévastateur, c’est un aimant indicible : comme une maîtresse sado-maso qui vous cloue au lit quand vous avez envie de vous lever et prendre vos jambes à votre cou ou un kidnappeur vous rattrapant lors d’une tentative d’évasion, comme un vortex faisant dériver la navette dans son vol stellaire. BEHEMOTH est aussi scotchant et occupe les pensées. C’était vrai avec l’inoubliable "The Apostasy", l’histoire se répète avec "Evangelion", mais moins longtemps... Bon, je ne dis pas que j’aurais une crédibilité déroutante si j’étais un fan inconditionnel du groupe (ce qui n’est évidemment pas le cas) ou que je considérais les Polonais comme une formation culte de Punk/Black/Sludge slave de fond de ruelle crasseuse… Disons seulement que BEHEMOTH déclenche quelque chose ardemment explicable ; ce doit être le cas chez tous les grands métalleux de ce monde j’imagine.

Donc, une bonne nouvelle. Nergal, le leader bellâtre et beau-parleur, ne cesse de hurler sur les toits (et sur la rondelle scintillante) depuis des mois qu’"Evangelion" est le boulot le plus abouti du groupe jusqu’à présent. « Ce n’est pas pour vendre l’album, je pense vraiment que c’est notre meilleur. Bientôt, vous pourrez vérifier par vous-mêmes », lance-t-il à tous les journalistes depuis que la virée en studio est terminée. Certains d’entre vous auront d’ailleurs pu suivre le déroulement de l’enregistrement grâce aux vidéos réalisées par le band. Un excellent moyen de charmer et de démystifier le processus créatif d’un opus de Metal, que plusieurs groupes emploient dorénavant. Un beau cadeau que le siècle du voyeurisme nous amène… Enfin.

Qu’est BEHEMOTH après tout, sinon une bande de joyeux lascars farouchement athées et fiers de l’être, essayant par tous les moyens d’éduquer les auditeurs à leur doctrine individualiste ? Ils aiment les caméras, adorent leur boulot (qui n’en est pas un) et drainent de plus en plus d’amateurs dans leur sillage. Ayant atteint le statut de vedette internationale avec un Death/Black à la voix sans merci, aux riffs percutants et à la batterie épouvantablement violente (j’insiste), BEHEMOTH ne vit pas sur du temps emprunté ; il déglingue notre équilibre à chaque occasion.

Il en a 9 cette fois des occasions, 9 plages, 9 tueries. Si vous souffrez encore des séquelles de leur dernier forfait, demeurez dans cet état de fragilité extrême, car le fouet de la mort n’est pas rangé dans le placard, il pend encore de la main de Nergal. Ses sinistres laquais, l’abominable Inferno, Orion (VESANIA) le bassiste solide comme le roc soutenant le duo et la deuxième gratte, Seth, à ses côtés. Le quatuor donne la charge avec "Daimonos" : petite intro englobante habituelle, les cordes se réchauffent, la double pédale aussi, l’ambiance cauchemardesque embarque tranquillement, les coups se font plus combatifs et… c’est parti pour la guerre ! La machine BEHEMOTH est en marche : batterie du tonnerre, growls « nergaliens » impossibles à rater, breaks rapides, reprises aussi empressées, court et cinglant refrain, samples à peine perceptibles à l’arrière-plan… Le jeu est plus technique que jamais, aussi clair qu’il y a deux ans.

Le déluge sévit ensuite sur "Shemaforash", la meilleure du skeud selon moi : près de quatre minutes d’une intensité paralysante avec un riff qui se grave sur le disque dur interne dès la première écoute et l’emploi brillant d’une cithare au début et à la fin. Derrière tout ça, la petite ligne de basse d’Orion s'incruste dans la chair tel un poignard et fout les jetons comme jamais, sublimant une composition déjà magistrale. Le genre de peur intrinsèque qu'a jeté jadis la magnifique "At The Left Hand Of God".

Le titre suivant, "Ov Fire And The Void", ralentit le tempo avec une décharge lourde et roulante, un peu mollassonne comparativement au duo de choc qui la précédait. Le rythme endiablé reprend sur "Transmigrating Beyond Realms Ov Amenti" avec son intro nerveuse et sa charpente complexe. BEHEMOTH ne lésine pas sur les détours et les cachettes, en architecte maboul qu’il a toujours été.

Les corbeaux se pointent ensuite sur "He Who Breeds Pestilence", morceau débutant encore lentement pour balancer savamment cette première moitié de « bonne nouvelle ». BEHEMOTH alterne alors un petit air tranquille avec la AK-47, dans un maelstrom en montagnes russes parfois difficile à cerner. Les atmosphères fantomatiques flottant à travers cette débandade de scies meurtrières paraissent parfois futiles tellement le son créé par les Polonais est assourdissant. Y’a pas à se tromper, BEHEMOTH ne flirte plus vraiment avec le Black, il planche à fond dans un Death froid comme la mort.

Bon, cessons ici le « track by track », le reste d’"Evangelion" est aussi coupant, souvent mélodique, toujours grognard. Les fûts d’Inferno et les cordes hantées du trio Nergal-Orion-Seth tiennent la mesure et la bouffent entièrement sans laisser de miettes ou de sang sur le parquet. Surtout sur "Lucifer", titre atypique de huit minutes, au groove particulièrement haineux qui se traduit par une supplique rougie par la douleur, une torture. Une façon inquiétante de tirer sa révérence temporairement et de brûler la peau jusqu’à la prochaine fusillade…

Mais, car il y en pas mal tout le temps un, nonobstant une maîtrise indéniable des commandes de son tank, BEHEMOTH souffre d’un manque de variété, de couleurs, de punch, et son "Evangelion" n’arrive ainsi pas à la cheville de "The Apostasy". Même constat qu’après l’écoute du nouveau DARK MOOR il y a quelques mois, un peu plus fadasse et moins couillu que "Tarot". "Evangelion" est beaucoup trop pompeux et rate parfois la cible ("Alas, Lord Is Upon Me") et a trop misé, à mon sens, sur les envolées austères et mièvres. Au lieu de mettre la Croix en charpie, il la graffigne seulement, à part bien entendu sur l’imbattable "Shemaforash" qui, gravée sur "The Apostasy", aurait scellé un des albums les plus réussis des années 2000.

BEHEMOTH livre pourtant un skeud véloce à suffisamment d’endroits pour se maintenir dans l’élite du Death est-européen. Il y a certaines choses dans la vie qu’on doit ressentir… et non expliquer.

3,5/5 arrondi à 4 pour la tête de bouc dévoreuse de Bibles.

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   (3 chroniques)



- Nergal (chant, guitare)
- Inferno (batterie)
- Seth (guitare)
- Orion (basse)


1. Daimonos
2. Shemaforash
3. Ov Fire And The Void
4. Transmigrating Beyond Realms Ov Amenti
5. He Who Breeds Pestilence
6. The Seed Ov I
7. Alas, Lord Is Upon Me
8. Defiling Morality Ov Black God
9. Lucifer



             



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