Pour tout vous dire, je ne suis habituellement pas un grand fan d’enregistrements de concerts. Le son est trop souvent brouillon, et quand il ne l’est pas par miracle, cela en devient hautement suspect. On imagine alors aisément les couches supplémentaires enregistrées en studio afin de maquiller les pains et autres imperfections. Dans ce cas, on a droit, au mieux, à un simili best-of, tout juste bon à faire découvrir un groupe à des jeunes ignorants. Notez que cela arrive même aux meilleurs, hein. J’ai ainsi été illuminé par Saint Angus et ses apôtres sur le "Live" d’AC/DC en 1991, pour mes quinze ans, avant de filer illico-presto poncer la disco des Australiens et me convertir pour de bon à la face cachée du Rock dur. Mais lorsque l’on fait déjà partie de la meute, ce type d’exercice s’avère généralement, au mieux, anecdotique.

Heureusement, DARK TRANQUILLITY est bien un groupe hors-normes, capable de pondre une œuvre sans fausse note durant trente ans, de maintenir la flamme d’un Death Mélodique parfois vacillant à un (très) haut niveau de performance. Et ce live en est, au final, une preuve supplémentaire, dans des proportions qui frisent l’indécence. Il cumule ainsi toutes les qualités que l’on est en droit d’attendre de l’exercice, et bien plus encore.

Déjà, le son est excellent, parfaitement balancé entre le caractère brut qui sied à un tel show, tout en maintenant le fragile équilibre qui guide les instruments entre eux. Les grattes sont râpeuses, la basse bien audible, le clavier impeccable dans le mix, la batterie cogne et Stanne règne en maître au-dessus de la mêlée, de sa voix magistrale. Le facteur X, le public, est parfaitement représenté, apportant chœurs et chants sur les moments emblématiques, sans que cela ne soit mis en avant de façon artificielle. Le DVD accompagnant le disque est la meilleure assurance quant à l’authenticité de la relation entretenue par le combo avec ses fans. Chapeau aux Italiens présents ce soir-là, ils ont retourné la salle. Pour avoir vu DARK TRANQUILLITY à de maintes reprises sur scène, je n’ai pas souvenir d’avoir assisté à une telle communion en France. Frissons garantis à plusieurs reprises.

Enfin, la setlist est proprement impeccable. Enregistrée à Milan en 2008 à l’issue de la tournée "Fiction", la setlist passe en revue les albums sortis jusque-là, n’oubliant pas au passage les titres les plus anciens de "The Gallery" et "The Mind’s I". Compte-tenu de la rareté, pour ne pas dire disparition, de chansons comme "Lethe", "Punish My Heaven", "Insanity’s Crescendo" ou encore "Dreamlore Degenerate" du répertoire live de nos jours, "Where Death Is Most Alive" est le juste reflet de la brillantissime carrière de la formation, titres "Projector" inclus. Bon, je n’aurais pas craché sur deux ou trois morceaux d’"Haven" supplémentaires, mais la galette est déjà bien assez riche, avec ses 21 pistes.

A noter pour les mordus, un reportage ("Out Of Nothing") sur les débuts du groupe absolument fascinant, compilant interviews des membres passés et actuels, ainsi que de guests prestigieux (Tomas Lindberg d’AT THE GATES et Anders Fridén d’IN FLAMES), en sus que de quelques extraits de concerts dans des MJC de Gothenburg. Ce documentaire est d’ailleurs disponible sur Youtube, pour ceux que cela intéressera.

Un must-have, et sans doute l’un des meilleurs live jamais sortis.