Le navire hanté des vampires anglais prenait l'eau depuis longtemps, au point d’être carrément en train de sombrer dans l'océan de la médiocrité. A son bord le capitaine Dani avait laissé Paul Allender seul à la barre, les moussaillons allant et venant au grès des vents.
Spectateur désabusé du naufrage je m'étais résolu à les voir se noyer pour toujours, la débâcle ayant même terni l'éclat des joyaux passés, des malles aux trésors remplis par d'autres équipages, oubliés et pourrissant dans les cales de l'embarcation.
(c’est bon, c’est bon, j’arrête de filer la métaphore flibustière)

Il faut dire que COF arnaquait son monde depuis les origines en laissant croire qu'il s'agit d'un vrai groupe avec une continuité dans la création. Ils ont vécu sur le prestige d'un "Dusk... And Her Embrace" écrit par le premier line-up mais réenregistrés par d'autres membres, qui proposeront une musique différente tout en maintenant les apparences et ainsi de suite jusqu'au retour de Paul Allender et sa mainmise durant de si longues et ennuyeuses années. Si le guitariste a bien servi, il est aussi grandement responsable du carnage à force de débiter des riffs insipides par milliers au sein de chansons sans âme. L'arrivée d'un batteur motivé et capable n'a pas empêché l'inéluctable sentence de tomber : COF devait mourir et disparaître.

Seulement voilà, Popol est enfin parti s'amuser ailleurs (WHITE EMPRESS ), de jeunes loups sont arrivés, musiciens talentueux, fans des grandes années du groupes et heureux d'être là. Ça ne tient pas à grand-chose finalement : COF a ressuscité artistiquement et propose son premier bon album depuis trop longtemps.

Les jeunots jouent vite et bien, assurent grave en concert et, remplis de sève créative, ont pondu un album impressionnant bourré de riffs qui tuent. Les claviers (composés par le batteur) sont efficaces et, sachant rester à leur place d'exhausteur de goût, laissent parler les guitares qui font la loi, virevoltants entre les styles du Metal Extrême. Le jeu de batterie technique, varié et athlétique de Marthus monte encore le niveau (mais je ne me fais toujours pas au son peu naturel qu'il s'évertue à donner à son kit d'album en album). La sympathique Lyndsay remplit à elle seule tous les besoins en voix féminine.
Ainsi entouré de zicos qui en veulent, tonton Dani est comme revigoré, tant sur disque que sur scène. Son chant suraigu étonne et impressionne à nouveau.
L’ensemble donne un disque coup de poing, varié, mélodique et brutal, qui respecte le lourd cahier des charges, propulsé par une envie d’en mettre plein le vue aux auditeurs. Mais à chercher à trop bien faire ils en sont un peu soûlant, de cascades de riffs en break et contre-break, sautant de styles en styles, on en perd le fil des chansons, comme ce "Yours Immortally.. " qui nous assomme par son énergie et nous ennuie dès l’ouverture du disque. Heureusement le groupe s’en sort toujours avec un riff thrashisant irrésistible et jouissif qui raccroche notre attention.
Si l’ensemble est trop touffu, les bons moments se perdant un peu dans la nuée, quelques belles réussites sortent du lot, "Enshrined In Crematoria" (chanson la plus cohérente et la plus Filthienne dans l’esprit, la seule entièrement composée par Rich Shaw), le festival de riffs tous puissants qu’est "Deflowering The Maidenhead, Displeasuring The Godd" (une vraie leçon de Metal, mon favori) et bien sûr le grisant et très réussit "Right Wing Of The Garden Triptych" (évoquant le panneau droit du chef d’œuvre de Bosch, accessoirement mon tableau préféré).
Une belle surprise donc, qui reste plaisante à écouter sur la longueur. Beaucoup de riffs qui déboîtent mais assez peu d’ambiances et de feeling vraiment prenants. On regrette le manque de morceaux à la personnalité marquée, le nouvel orchestre ayant su garder le coté foisonnant et varié du soi-disant "style CRADLE" mais il peine a créer des hymnes inoubliables (la barre de "Dusk… And Her Embrace" étant définitivement trop haute).
Avec plus d’expérience et plus d’assurance on espère que ce petit monde nous concoctera une prochaine salve aussi percutante mais avec plus d’âme. On a recommencé à y croire et c’est déjà bien.

4/5 en guise d'encouragements.