Après un "Animalize" de bonne facture quoique très classique, KISS poursuit dans la voie du Heavy Metal bien dans l'air du temps. Pendant cette période démaquillée, on observe un lent virage vers la modération : "Lick It Up" est carrément bourrin, "Animalize" nettement moins et sonne plus FM tout en restant bien heavy, et la saga se termine avec un "Crazy Nights" caricaturalement AOR. Entre les deux premiers et le dernier, on trouve donc "Asylum", qui marque bien la transition entre "Animalize" et "Crazy Nights".

Et c'est là son principal inconvénient. On a clairement basculé dans le Hard FM, même si certains titres, comme "Anyway You Slice It" et "Love's A Deadly Weapon", sont là pour nous rappeler que Gene Simmons est encore bien burné, qu'Eric Carr en a sous le coude et que Bruce Kulick n'est pas un manche. Car le véritable maître d’œuvre de la ligne artistique de KISS porte désormais un nom, et ce nom c'est Paul Stanley. Sous son égide, le groupe accouche d'une pléthore de titres aux refrains poussifs à grands renforts de chœurs massifs et aux mélodies sucrées. Le soupeux "Tears Are Falling", single commercial par excellence, en est le porte-étendard.

Tout cela manque cruellement d'originalité et d'identité. Alors que c'était ce qui faisait l'une des marques de fabrique de KISS, on a vraiment aucun bon riff à se mettre sous la dent. Bruce Kulick est un très bon gratteux, pour qui j'ai de l'estime. Techniquement parlant, il est au point, aucun doute là-dessus. Mais on est tellement loin du caractère, du style, du feeling du déjanté et regretté Ace Frehley... Ou même des délires orgiaques d'un Vinnie Vincent, qui serait sûrement resté longtemps en place s'il n'avait pas été aussi cinglé.

"Asylum" aurait été enregistré par un autre groupe, on y aurait vu que du feu. À l'écoute de cet album, on a un peu le sentiment que KISS navigue à vue. Le groupe s'est contenté de proposer ce qui était à la mode à l'époque, sans prendre le soin d'y imprimer sa marque. On ne ressent plus du tout l'enthousiasme et l'entrain de "Lick It Up" et surtout "Animalize", qui paraissent plus spontanés, moins linéaires. Au bout de plusieurs écoutes, on en retient pas grand-chose, voire rien du tout, et on s'en lasse vite. "Asylum" sera d'ailleurs rapidement oublié, même si "Tears Are Falling" fait ponctuellement sa réapparition lors des concerts du groupe. Cette période démaquillée de KISS n'était pas résolument mauvaise mais finalement assez pauvre en moments mémorables.