SKEPTICISM restera à jamais un groupe que je n'aurai que partiellement compris. La musique me parle immédiatement, l'ambiance se colle à ma peau et n'en part jamais. J'entreprends l'écoute comme un voyage, tant il y a d'images évidentes pendant la lecture.

Pour autant, je ne comprendrai jamais leur but personnel. Je n'aurai jamais compris ce qu'ils essayaient, eux, en tant que musiciens, de communiquer. Ça va au-delà des paroles, leurs idées sont au-dessus de tout ça et ils les expriment par la musique certes, mais les indices qu'ils laissent traîner afin de démêler leur vision du monde et de la vie m'échapperont toujours.

Après une hibernation interminable de 5 ans, de laquelle j'ai réellement cru qu'ils ne sortiraient pas, les voilà subitement de retour.

"Alloy" est particulier, beaucoup plus que "Farmakon". La raison pour laquelle je le trouve si étrange est l'utilisation presque abusive du clavier-orgue, que je trouve trop grotesque pour que ce fusse une erreur. Trop mixé en avant, trop caricatural ("Antimony"), trop prépondérant. Je ne m'y fais pas. Il y a, encore une fois, une idée derrière, complètement à l'opposé de la parodie, mais elle m'échappe, à nouveau, et ne reste que ma gêne pendant l'écoute de cet instrument devenu énorme.

"Alloy" est riche, si l'on estime la richesse d'une musique par la quantité de riffs, de mélodies diverses, de changements de rythme... En cela, "Alloy" l'est, oui. Il est, en effet, plus vivant que tout ce qu'ils ont créé auparavant. Et de moins en moins mélancolique (effet déjà observable sur "Farmakon").

Mais "Alloy" est également bien moins réussi que leurs précédents albums. De nombreux riffs tournent à vide, de très longues parties manquent cruellement d'ambiance, et surtout, la patte SKEPTICISM se fait très, très discrète. Si ce ne sont la batterie lointaine et ses toms en forme de gong ainsi que le chant soufflé et un peu mystique, j'ai vraiment l'impression d'écouter du Funeral Doom "comme on peut en faire". Structures et sonorités qui rappellent MOURNFUL CONGREGATION, riff et chant parfois honteusement pompés sur MY DYING BRIDE... J'exagère un peu, mon amour pour SKEPTICISM m'aveuglant autant qu'il me pousse à juger très sévèrement.

Un truc que je trouve par contre franchement bien trouvé, et d'ailleurs absolument nouveau dans ce genre musical aux codes si cloisonnés, c'est l'impression que SKEPTICISM démarre ses titres comme s'il y avait eu 8 mins de riffs déjà passés. Pas d'introduction, pas de fade-in, ça démarre sec sur un riff bizarre. Le genre de riff qu'on attend en milieu de titre de Doom, celui qui est amené par plusieurs minutes de guitare languissante. Et là, c'est direct les pieds dans le plat. C'est très loin d'être gênant, c'est même une bouffée d'air dans ce milieu, vraiment.

Où sont passées les montées en puissance suivies par le clavier, menant à un pic musical infernal ? Les explosions d'émotion quand tous les instruments s'excitent ? Pourquoi ne pas avoir poussé plus avant ce passage angoissant sur la piste n°4 de "Farmakon" ? Pas grand-chose n'est resté. Un petit souffle épique sur "The Arrival", quelques moments poignants sur "Antimony" et "Pendulum"... J'ai l'impression que SKEPTICISM s'est réveillé, et a travaillé tard. Je ne sens pas 5 ans d'évolution sur ce nouvel album, j'entends quelque chose de finalement vieillot, parfois dépassé par ce que les nouveaux du Funeral Doom, ou du Doom en général, savent désormais faire.

Je considère cet "Alloy" comme un petit album de SKEPTICISM. Un truc qui ploie rapidement face à la toute-puissance d'ESOTERIC, réveillé lui aussi en 2008 après 5 ans de coma, et grondant comme un dieu.

Ce sera un 2 pour moi, signe de l'album moyen, comportant autant de trucs géniaux que de fautes et/ou de moments vains. Avec comme titre génial: "Pendulum", et comme sombre merde, "March October".