J'ai toujours trouvé le qualificatif "Viking Metal" quelque peu ridicule et artificiel.

L'exaltation du Grand Nord, l'amour des récits scandinaves, la volonté de faire revivre un epos teinté de romantisme et la conjugaison de tous ces aspects en une ode aux racines païennes de l'Europe ne sont finalement que du Black Metal, mais passons.

"Arntor" est un de mes albums de Black Metal préférés et ce pour plusieurs raisons.

La première est nostalgique. Quand j'étais estudiantin à Poitiers et que déjà je luttais contre tous ces bolchéviques infâmes qui peuplent les mornes couloirs de l'université de lettres, je découvrais en même temps le Black Metal, et WINDIR fut, aux côtés de BURZUM, EMPEROR et SHINING, mon groupe de chevet. Au creux de mes oreilles, "Arntor" constituait une bande-son des nuits d'insomnie, comme "Filosofem". Il me faisait rêver cet album, et il continue de le faire. Son écoute m'emportait loin, très loin de la grisâtre chambre d'étudiant où je me régalais de pizzas à 2 euros 80 et dans laquelle Facebook faisait ses débuts, permettant déjà moult passes d'armes avec de fieffés gauchistes aussi pénibles en virtuel que dans les salles universitaires.

La deuxième tient dans la pure qualité mélodique. Les petits malins qui voudront me convaincre que "Arntor" ne riffe pas, ou pire, n'a pas d'âme, peuvent aller mélenchonner sur les trottoirs. Il y a dans "Arntor" tout le génie du Black Metal le plus beau, le plus épique, le plus tragique et, définitivement, le plus romantique. Car oui, le Black Metal est romantique, et WINDIR assume pleinement cet aspect. Oui les Vikings étaient des mange-merdes tueurs de moines qui crevaient la dalle et alors ? Laissez mon Black Metal fantasmer la Scandinavie bordel ! Mettez-moi du gros chœur de rameurs de drakkar sur "Kong Hydnes Haug" avec des claviers bien old school et ne me faites pas chier ! Écoutez-moi ces chœurs incroyables et dites-moi que vous ne vibrez pas? Putain j'ai presque envie de devenir odiniste avec ces conneries, c'est magnifique ! On le voit le Valfar, fier et noble face à un fjord, comme le voyageur de Caspar David Friedrich au-dessus de la mer de nuages. Du romantisme je vous dis, partagé entre la nostalgie, la contemplation et la volonté d'action. WINDIR le Chateaubriand du Black Metal, rien à foutre !

La troisième réside dans l'âme, l'âme pure, totale, vibrante et éternelle de ce "Arntor". On peut se pignoler mille ans sur les claviers kitsch, la structure et les fadaises de petits historions à la zob, le Black Metal tient par le riff, mais surtout par l'âme, et cette dernière se construit via une magie rarement explicable. Avec WINDIR, est-ce un savant mélange d'une production intemporelle, une mixture superbe de riffs incandescents couplés à des chœurs légendaires ? Quand "Svartesmeden Og Lundamyrstrollet" débarque, il est certain qu'il y a un souffle, un quelque chose. Et ne parlons pas de "Kampen", certainement un des meilleurs titres de toute l'histoire du Metal. Ça transpire le Beau, j'en chiale à chaque fois, rien n'y fait. Le poil se dresse, le paysage est peint devant nos yeux ébahis, le Viking fictionnel apparait soudain, fort et droit comme une statue antique. Il a le regard conquérant des Européens de jadis, encore non matrixés par des décennies de gauchisme, la rage au ventre, la gloire comme seul horizon, mais déjà ce désir d'explorer, de découvrir, de parcourir les eaux et les terres inexplorées pour aller y mettre son gros cul de Scandinave et détrousser quelques rombières exotiques pour transmettre du gêne de guerrier débile.

La plus grande force de "Arntor" n'est pas d'être pénétré de cette magie propre aux albums uniques, mais bien de traverser le temps sans rides, habité par un souffle quasi divin, comme si Valfar avait composé l'esprit possédé par les dieux nordiques d'autrefois. On y revient avide de nostalgie, de Beau et surtout d'énergie, une énergie que retrouvera un jour notre belle Europe, n'en doutons pas !